Chapitre 6 : LE BAISER D’AMOUR AU CŒUR DE L’IMAGINAIRE SOCIAL
La pratique du baiser sur la bouche est révélatrice d’une idée de l’amour comme modèle du lien social structurant l’ensemble de la société médiévale. Elle apparaît dans notre corpus visuel comme l’héritage d’un symbole de conciliation vassalique mais aussi comme la nouvelle étape d’un rituel amoureux, codifié par un ensemble de gestes.
Le baiser amoureux est la deuxième étape succédant traditionnellement à l’immixtio mannum, lors de la cérémonie de l’hommage. Elle puise son inspiration dans le rite de l’osculum vassalique. Ce baiser donné sur la bouche, appelle un geste d’étreinte. Les artistes soulignent souvent son importance en lui accordant une place au centre de la représentation ou du registre concerné par la scène. La main posée sur la joue est un geste souvent féminin qui positionne la dame en tant qu’initiatrice du baiser. L’enlacement relatif à une volonté de protection, comme la main posée sur la poitrine, significative d’un désir de possession, sont, en revanche, des gestes caractéristiques de l’emprise exercée par l’amant sur le corps féminin.
Le baiser détermine le début des obligations entre un vassal et son seigneur et, de la même façon, scelle une promesse de fidélité entre la dame et son bien-aimé.
L’hommage, le don et le baiser sont les trois thèmes dominants situés au cœur de la thèse. Ils sont révélateurs de pratiques rituelles ancrées au sein du couple courtois. L’hommage présidant aux séries de notre corpus iconographique, marque la première approche cérémonielle entre l’amant impétrant et sa dame souveraine, le début d’un service d’amour qui lie l’homme à son aimée jusque dans la prière conjurant son absence. Le baiser et le don scellent la promesse de fidélité amoureuse et le commencement de certaines obligations.